Les métiers de la vigne sont physiquement éprouvants. Il faut s’armer de patience, surtout quand il s’agit de la taille de la vigne. Même si les outils ont été perfectionnés, il reste bien des tâches difficiles, à commencer par la taille d’hiver. On vous explique pourquoi.
La taille de la vigne, ou plutôt,
LES tailles de la vigne.
La vigne est une liane. Cela veut dire une plante à croissance continue qui va croître chaque année. Les rameaux de certaines espèces peuvent croître de 20 à 30 mètres par saison ! Donc, si on ne canalise pas cette vigueur, elle va vite ressembler à une forêt vierge. Alors, le vigneron se doit de tailler la vigne chaque hiver.
Comment, me demanderez-vous ? Eh bien, avec un sécateur, et selon un schéma très précis. Ne s’improvise pas tailleur qui veut !
La taille de la vigne est très technique. En effet selon les cépages, et les régions, on adoptera un type de taille bien précis. C’est donc une mission confiée à des tailleurs très expérimentés.
Sans faire une trilogie académique en 3 volets de 110h chacun, voici les principaux types de taille et quelques vignobles où il se trouvent :
- Guyot : bois laissés longs (comme en Alsace ou à Bordeaux)
- Cordon : bois laissés courts (vignoble méditerranéen)
- Gobelet : buissonnant (Beaujolais, Côtes du Rhône Sud)
- Échalas : avec piquet (Côtes du Rhône Nord)
- Pergola : avec palissage au dessus de la tête (Portugal, Japon)
Retenez que, de la bonne taille de la vigne, découlent de nombreuses conséquences ou répercussions potentielles :
- Rendements en raisins
- Qualité des fruits
- Maladies phytosanitaires
- Santé des bois
- Reprise à l’année N+1
- Risques d’arrachage par les tracteurs…
La taille est donc une étape PRIMORDIALE pour une bonne fructification, et à la qualité des raisins. Elle est régie par décret d’appellation, et doit être faite l’hiver.
La taille de la vigne doit se faire au bon moment. Pourquoi l’hiver ?
Un vieil adage dit : « Taille tôt, taille tard, rien ne vaut la taille de mars ».
La vigne dort l’hiver, lorsque les journées sont courtes et froides. Elle reprend son cycle végétatif au printemps, lorsque « l’atmosphère » se réchauffe. La montée de sève entraîne les pleurs. S’en suivra le bourgeonnement, la pousse des feuilles, des tiges puis des fruits.
Taillée trop tôt, la vigne sera plus exposée aux maladies de la vigne. À l’inverse, une fois que la vigne bourgeonne, il est déconseillé de la tailler car on perturberait l’équilibre de sa croissance, la bonne maturation des raisins et la répartition homogène des grappes sur le cep.
Tout ce qui aura été laissé à la taille, va donc pousser au printemps. Il faut bien calculer son « coup », car bien des périls guettent les futures pousses. Gel de printemps, grêle, sécheresse, coups de chaud, réchauffement climatique et bourgeonnement précoce, maladies cryptogamiques, petites bêtes en tous genres qui se régaleront des feuilles & des fruits ! Un vrai parcours du combattant !
Autant vous dire que lorsque les raisins sont en cuve (ou au pressoir) le vigneron peut souffler ! Reste à savoir combien il a pu récolter, et dans quel état ils sont rentrés.
Le fruit d’un long travail, mais à la récompense ô combien gratifiante !
La taille d’hiver est une tâche très chronophage. Les bons tailleurs peuvent tailler jusqu’à 120 pieds/heure. Selon le vignoble, vous aurez 5000 à 10000 pieds/ha en moyenne, (densité imposée par décret d’appellation – donc liée à la région). On vous laissera faire vos calculs 🙂
C’est donc un poste onéreux qui peut représenter jusqu’à 30% des coûts d’entretien du vignoble à l’année. Mais ce n’est pas tout.
Il est aussi fastidieux (pour ne pas dire franchement pénible : si vous n’aimez pas rester dans le froid 8h/jour, avec de bons embruns maritimes si vous êtes sur la façade atlantique, avec 3°C à midi et à l’ombre, les pieds et mains engourdis, et de temps à autre, un sarment récalcitrant qui vous fouette le visage, passez votre tour). Dans certaines régions, les tailleurs poussent une brouette-brasier, qu’ils alimentent avec les sarments fraîchement taillés. Cela permet de réchauffer un poil l’ambiance (cf photo d’en-tête) et de se préparer un petit barbecue d’hiver !
Alors la prochaine fois que vous savourerez une bouteille de vin, vous pourrez vous dire qu’il y a minimum 18 mois de travail, depuis la taille jusqu’à la mise en bouteille.
Ce que Marie-Dominique Bradford traque sans relâche, et se démène à détecter, ce sont bel et bien ces parcelles bichonnées par les mains robustes et minutieuses de nos artisans vignerons. Et ces trouvailles, vous pouvez toujours vous les procurer sur notre cave en ligne ou les recevoir mois après mois en vous abonnant à la box Trois Fois Vin, qu’elle a créée en 2010.
Allez savoir ce qui pousse nos vignerons à sortir 3 mois/an dans ces conditions. Nous, on a une petite idée. On récolte ce que l’on sème ! Comme le disait un Grand Homme du vin :
« Donnez moi de bons raisins, je vous ferai de bons vins. »
Émile Peynaud
Chercheur-Œnologue – 1912 – 2004